On en parle, on en parle… et si les migrants parlaient d’eux-mêmes ? Cela arrive, c’est arrivé. Migrants ou « en transit » entre prolétariat et lumpen avec trajets dans les deux sens, errants, sans-papiers donc sans droits, corvéables à merci, asociaux, chômeurs, détenus, « déclassés ». Ils n’ont pas parlé en l’air mais en actes, dans la lutte et dans la fête. Le récit de leur précaire épopée, pépite d’une histoire occultée, commence, ici, en 1970, autour d’une tasse de café entre voisins, dans un foyer (traduire : une garderie) Ozanam, à Échirolles, au sud de Grenoble. Le refus, partagé, du paternalisme autoritaire, gagne le foyer Sonacotra d’en face. La narratrice est la meneuse elle-même, « brebis galeuse » ou fragile héroïne, et son récit a été publié pour la première fois en 1980 par les éditions Syros, dans la collection « à la première personne ». Il n’a rien perdu de son actualité, au contraire, et l’éditeur indépendant La courte échelle / éditions transit, séduit par « la qualité et la pertinence de l’écriture », a décidé de le rééditer, accompagné d’une préface et d’un dessin de couverture de Frédérique Guétat-Liviani, fille de Yolande, qui a vécu « à hauteur d’enfant » cette « révolution minuscule » et expérimentale.