Je suis étrangère présente sur un sol occupé par des étrangers que je ne suis pas venue rencontrer. Ce sont les Palestiniens que je viens rencontrer. Je ne sais pas dialoguer dans la langue arabe mais je suis accompagnée de bons traducteurs. J ai reçu chaque dessin denfant comme une lettre. Dun seul mouvement, dans un temps unique, le dessin nest pas retravaillé. Grâce à la traduction des étudiants présents , quelques enfants ont eu la possibilité de me transmettre un commentaire, court parceque le temps est court, pas seulement à cause de mon organisation. Le temps en Palestine ne se déroule pas, il est en fragments imprésibles liés aux ruptures imposées par les agressions de larmée israélienne. Chaque instant posé pour faire quelque chose est un instant de gagné. Les étudiants, sont presque tous des enfants de la première intifada, jai été témoin pendant un mois de leur présence dans les centres culturels et jardins denfants, animateurs, en collaboration avec les responsables de chaque centre. Avec une grande douceur femmes et hommes écoutent les commentaires reconnaissant eux mêmes ce quils vivent au quotidien et chaque fois quils aperçoivent une possibilité dévasion dans lexpression, ils proposent aux enfants de sen saisir Rentrée en France, jai réalisé en regardant ces dessins un par un , combien ils montraient le réel , ils sont inconsommables contrairement au journal télévisé. En regardant les photographies, le contraste entre la tenue et la personnalité de chaque enfant face aux entraves de la vie quotidienne, jai ressenti à nouveau le soin du vouloir vivre, jai ré-entendu cest aussi pour demain . Palestine, conflit, jentends souvent le mot la situation à la place de colonisation armée et peut on situer le mot Palestine sur une carte? Ces territoires où la terre est de plus en plus racourcie et ne peut officiellement être nommée , sont comme des tremblements de terre quotidiens, des catastrophes sans les secours de laide humanitaire internationale. Ce sont des tanks, des bulldozers, qui font la carastrophe , la nakba . Destructions visant à déstructurer lorganisation de la vie , qui obligent les enfants à grandir sans les repères dune route partant d une maison vers lécole , du champ dolivier qui nest plus un champ mais une terre détruite. L hôpital en ruine nest plus le lieu de la réparation du corps , la mer nest plus un lieu dévasion cest lappropriation des colons et sen approcher pour prendre un bain, cest risquer sa vie. Tous les jours des enfants échappent à la surveillance des adultes et certains risquent leur vie pour vivre , pour sinventer des repères que larmée israélienne leur interdit. Ils risquent aussi leur vie pour jouer, pour sapprocher des murs gardés par les miradors, pour un cerf volant qui suit le vent qui ne reconnaît pas larmée. Ils risquent et perdent leur vie devant un char devant lequel ils se postent avec des pierres, car ne pas braver cette peur cest ne pas résister à la peur et se réfugier dans lombre dune maison, qui de toute façon ne signifie plus depuis longtemps la sécurité. Personne ne peut vivre avec la peur sans la défier, un grand nombre dentre eux sont malades de lagression quotidienne de jour et de nuit , du couvre feux total sur des jours et des jours. Lorsquils bravent linterdiction de sortir cest pour prendre une bouffée de vie et concrètement se mesurer à être encore debout demain. Doù prennent ils cette force ces enfants là , qui ne sont pas différents de tant dautres enfants? Peut être dun endroit que les adultes de larmée occupante ne peuvent saisir, dun désir naturel de vivre et grandir qui n appartient quà eux ? Tant quils arrivent à échapper à lagresseur et que la société palestinienne échappe elle même au renoncement, cela forme une unité qui se projette dans un avenir tourné vers un monde ouvert. Marseille, mars 2004 Muriel Modr