Nous avions déjà reproduit l'article que François Bernheim avait consacré sur le site "Mardi ça fait désordre" à Diwãn des mots voyagés, Des mots qui disent que nous sommes vivants.
Dans Marseille, la ville à abattre, publié à la fois sur Mardi ça fait désordre et sur son blog de Médiapart, il revient sur le travail de Muriel Modr :
"L’artiste plasticienne Muriel Modr, avec la participation des femmes de l’association Contacts de Gardanne et du centre Agora du quartier de la Busserine, a conçu un projet artistique, « Diwan des mots voyagés »). A travers une série de rencontres, conversations à brûle-pourpoint, rituels du quotidien, les femmes venant du Maghreb, d’Andalousie, du Moyen-Orient, de Mésopotamie, de Perse, d’Arabie, d’Inde, retrouvent la trace d’un passé qu’elles croyaient enfoui à jamais. Un mot en appelle un autre. Ricochets, chassés-croisés dans un contexte bienveillant, réactivent une mémoire seulement mise entre parenthèses. Le jeu fait sourire, rire.
« Depuis artichaut jusqu'à chardon, le mot entraîne le projet de cuisiner ensemble un plat coutumier pour fêter le printemps… Artichaut, du lombard articiocco, lui-même issu de l’arabe Ardi chouki, « l’épineux terrestre », par l’espagnol alcachofa et l’italien carciofo »... Elles ne sont ni des linguistes chevronnées ni des académiciennes, mais découvrent qu’elles savent beaucoup plus de choses qu’elles ne pensaient. Ces mots qui ont tant voyagé sont cartographiés, dessinés. Ils véhiculent la vie vivante, celle qui fait qu’au bout du compte, on peut avec ravissement découvrir qu’il n’y a pas de meilleur expert de sa propre existence que soi-même naviguant entre les mailles d’un tissu ami. Diwan, au seizième siècle, est en persan un écrivain, un poète ; plus tard en Turquie un bureau administratif, un conseil gouvernemental. A partir du dix-huitième siècle, le diwan est le siège allongé se trouvant dans la salle. Ici, l’artiste ne fait pas du social, mais c’est plutôt la société, quel que soit son bagage académique qui devient esthète. Comme le dit Nadège dans l’ouvrage qui met en avant cette expérience, « Parler une langue de complicité et d’histoire, se retrouver dans une langue, ne veut pas dire que l’on s’est perdu dans une autre ». L’aventure du Diwan continue."
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